Fédération Francaise de Naturisme Conseil régional Auvergne - La Serre de Portelas 63450 Saint Saturnin.

Le journal "LA MONTAGNE" raconte Le Club du Soleil de Clerrmont-Ferrand et son camping le 18/09/2023 à 09h34

 

Dans le Puy-de-Dôme, 60 ans de camping naturiste sur un plateau

De retour de vacances du Cap d'Agde, un groupe d'amis décident de créer un camp naturiste dans le Puy-de-Dôme. Ils l'installent sur les hauteurs de Saint-Saturnin. Aujourd'hui, ce camping de la Serre de Portelas fête ses 60 ans.

Ah, le naturisme ! Ce sentiment de liberté, de communion avec la nature, avec le soleil qui caresse les peaux et le vent qui chatouille les… Hop, hop, hop : on ne s’emballe pas ! Ce n’est pas parce qu’on est à poil qu’on ne sait pas se tenir. Bien au contraire. D’autant plus qu’en cette journée de juillet, les 17 °C affichés n’encouragent personne à se séparer du textile.

Aujourd’hui, on supporte bien son slip", confirme un vieil habitué. "Quand il fait froid, on s’habille. Comme tout le monde", ajoute Laurent Bégon, bénévole depuis de nombreuses années au camping de la Serre de Portelas, à Saint-Saturnin. Un lieu unique dans le Puy-de-Dôme qui fête ses 60 ans cette année.

 

La naissance du camping, une vraie aventure !

Sa création relève de l’aventure. "C’est vrai qu’on est un peu des dingues", relève Michel, un vieux de la vieille, qui était déjà là à la naissance du projet. "En 1963, un groupe de Clermontois, de retour du Cap d’Agde, décide de prospecter pour dénicher un terrain, explique Nicole, pionnière elle aussi. Cela nous a pris du temps, car nous étions assez exigeants et il fallait remplir de nombreux critères. Nous recherchions notamment un espace avec beaucoup d’arbres."

Après avoir abandonné l’idée de s’installer près de Volvic, ils jettent leur dévolu sur six parcelles à Chadrat, un plateau sur les hauteurs de Saint-Saturnin. Au commencement, ils les louent à des paysans du coin, un brin amusés par leur démarche.

"Il était un peu compliqué de créer une association de ce type à l’époque. Alors, nous avons adhéré au Club du soleil de Paris qui gérait déjà plusieurs lieux en province, notamment sous la présidence d’Albert et Christiane Lecocq, précurseurs du naturisme en France."

Ils s’installent d’abord sur 2,5 hectares : "Notre première tâche a été de débroussailler et d’installer une clôture. Déjà avec un esprit de récup’ puisque, pour des raisons de budget, nous avons alterné les piquets neufs avec de vieux bouts de bois qui soutenaient les vignes du coin."

Les agriculteurs et "les culs nus"

Si au départ, ils s’amusaient de voir "les culs nus" s’affairer sur leur terrain, les agriculteurs locaux acceptent de leur prêter un peu de matériel et quelques engins. Les premiers aménagements de loisir sont ainsi installés, à commencer par le terrain de volley et des jeux pour enfants.

Entre 1966 et 1967, le remembrement leur permet d’acheter de nouvelles parcelles : désormais propriétaire de ses terres, le camping s’épanouit aujourd’hui sur près de 16 hectares, dont 6 sont aménagés. Les statuts du Club du soleil de Clermont-Ferrand sont déposés en préfecture en 1972.


 

Seize couples précurseurs et des conditions précaires

Pour les seize couples qui ont œuvré aux débuts du club, les conditions ont longtemps été précaires : il n’y avait ni eau ni électricité sur place. "Nous venions avec de grands tonneaux. S’il faisait beau, vous pouviez prendre une douche chaude. S’il faisait froid, vous ne preniez pas de douche, s’amuse Michel. Le terrain est particulièrement caillouteux. Il a fallu beaucoup d’huile de coude pour l’aménager."

Il aime également revenir sur l’épisode des toilettes : "Nous nous sommes rapidement aperçus que c’était l’un des premiers aménagements vitaux. Les genêts ne suffisaient plus. Un jour, l’un des adhérents est donc arrivé avec un grand placard. Il restait à trouver un emplacement stratégique. Je ne dirai pas où mais, s’ils savaient, certains joueraient peut-être moins aux boules… Nous avions installé ces toilettes de fortune sur pilotis, en bordure de la falaise. L’apesanteur et les saisons se chargeaient du nettoyage."

L'eau arrive dans les années 70, l'électricité en 1995

L’eau arrive finalement dans les années 1970. Puis le téléphone. Mais pour que l’électricité arrive à la porte du site, il faudra patienter jusqu’en 1995. "Les travaux ont été menés petit à petit, indique Bernard Jeremko, actuel président de l’association. Sauf pour la piscine ou la station d’épuration, où nous avons fait appel à des professionnels, cela a toujours été l’art de la débrouille. Cela ne nous a pas empêchés d’accueillir nos premiers vacanciers aux débuts des années 1980."

Le camping de la Serre de Portelas n’a jamais abandonné son état d’esprit initial : il est toujours sous statut associatif et géré bénévolement. Il compte aujourd’hui 230 adhérents et accueille, en plus, chaque été, une bonne centaine de touristes : il propose notamment six mobile-home et une caravane à la location.

Un type de vacances avec des valeurs qui reviennent à la mode

Ce mode de vacances semble séduire de plus en plus, notamment depuis le Covid : "Les gens ne veulent plus forcément aller loin ou dans les grands centres touristiques. Nous sommes idéalement placés pour découvrir l’Auvergne ou pour s’arrêter en descendant dans le Sud. Mais aussi un peu loin de tout, histoire d’être tranquille. Il faut dire aussi que nous pratiquons des tarifs particulièrement attractifs et cela joue forcément en cette période d’inflation."

Des journées découvertes sont organisées chaque week-end en été avec un diplôme à la clé. "On essaye de dépoussiérer l’image que les gens peuvent avoir du naturisme. Chez nous, il n’y a pas que des retraités". Des jeunes couples, des amis, des familles avec enfants, Bernard en voit de plus en plus. "Je crois que l’endroit s’y prête. Ici, tout le monde prend soin de tout le monde."

Les bénévoles aiment mettre en avant cette petite anecdote : "Notre adhérente la plus âgée a été embarquée par Mimi, son mari. Mais elle était réticente. Pour retarder l’échéance, elle se disait "pourvu qu’il pleuve. Pourvu qu’il fasse froid". Par un beau dimanche ensoleillé, elle a finalement tenté l’expérience. Depuis, elle n’a jamais cessé de venir et, aujourd’hui, quatre générations de sa famille se retrouvent au camping. Nous en avons d’ailleurs tiré une belle photo qui résume bien notre état d’esprit et qui figure dans nos éléments de communication."

Au fil des années, le règlement intérieur, assez strict initialement, a retiré quelques épaisseurs. Si les tatouages étaient interdits, ils sont aujourd’hui acceptés. Cela reste toujours un peu compliqué pour les piercings intimes. Mais le survêtement bleu, qui était imposé pour tous lorsqu’il faisait frisquet, est définitivement aux vestiaires. "Nous repérons très vite ceux qui viennent pour de mauvaises raisons et nous n’hésitons pas à rapidement leur montrer la sortie", insiste Bernard Jeremko.
Au camping de la Serre de Portelas, le naturisme a conservé sa virginité : il reste un art de vivre, avec l’objectif d’être en communion avec la nature en étant nu de manière collective, familiale, amicale et bienveillante.

"L’indécence, c’est d’abord dans le regard des autres, terminent les bénévoles. Nus, les caractères sociaux ou professionnels disparaissent. On ne peut plus être définis par notre apparence. Cela permet aussi de s’assumer, de prendre conscience de son corps tel qu’il est." Un hymne au respect de soi et d’autrui.

Texte : Fabrice Mina

 

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